Tableau des incidents dans le processus électoral

L’Observatoire politique tunisien se propose d’établir un classement des plus mauvais élèves en matière de respect des règles du processus électoral. La tâche n’est pas simple tant les infractions sont nombreuses et les allégations non vérifiées systématiquement. Pour cela nous allons faire appel à deux sources principales : l’Instance Supérieure pour l’Indépendance des Élections (ISIE) et la plateforme citoyenne NCHOOF. Ces deux entités proposent une carte des infractions, au jour le jour, qui nous permettront de réaliser ce classement.

Plusieurs difficultés demeurent néanmoins dans notre objectif typologique comme l’absence de certitudes quant à l’impartialité des observateurs citoyens (pour NCHOOF) et indépendants (pour l’ISIE). On entend ça et là des rumeurs de connivence entre ces derniers et certains des partis politiques en lice pour l’élection. De nombreuses demandes de remplacement des comités d’organisation à l’étranger (France, Algérie, Italie, Égypte, Qatar, Suisse) circulent sur internet mais à ce jour seul un bureau à été reconnu coupable de partialité et renouvelé au Qatar, même si Al jarida évoque des soupçons pour le bureau de Bonn en Allemagne. Des demandes également en Tunisie ou des Sms circulent pour encourager à voter pour une liste à Sousse, procédé identique à celui du Qatar, nous verrons si les mêmes causes auront les mêmes conséquences… Rien de trop alarmant cependant qui laisserait penser à une manipulation généralisée, peut être simplement une conséquence aux déclarations de Rached Ghannouchi qui a mis sur la table le sujet de la fraude électorale à deux jours du scrutin. Ses militants, eux en tout cas, ne lésinent pas sur les moyens pour influencer le vote en faveur du parti islamiste…

Au delà de cette donnée sur la partialité, il est important d’émettre une critique sur les plateformes elles-mêmes, sur lesquelles nous recueillons nos données. Il faut préciser que tous les partis n’ont pas une politique de dénonciation systématique des fraudes des adversaires. Par conséquent les partis qui mettent en place une telle politique de vérification du comportement des concurrents dénoncent plus qu’ils ne sont dénoncés. De la même manière, les partis qui sont présents dans l’ensemble des circonscriptions auront mathématiquement plus de chances d’être reconnus coupables d’infractions dans la mesure où leur territoire d’action se démultiplie et leurs militants aussi. Enfin, le temps de vérification des informations de l’ISIE est beaucoup trop long pour pouvoir répertorier exhaustivement les infractions ainsi que leurs auteurs contrairement à la plateforme citoyenne qui répertorie très rapidement mais sans vérifications.

C’est pourquoi, en l’absence de certitudes quant à la partialité des dénonciations et parce que nous ne connaîtrons jamais le nombre exact d’infractions, l’Observatoire politique tunisien a fait le choix d’écarter les données quantitatives au profit des données qualitatives. Pour une meilleure représentativité de la réalité des infractions, nous ne ferons pas un classement du plus gros contrevenant mais nous relèverons si oui ou non les partis se sont rendus coupables des différents types d’infractions. Cela nous renseignera ainsi sur les méthodes électorales des partis et leur « fair-play politique ». Nous nous baserons donc sur les données officielles de la plateforme ISIE en mentionnant le résultat de la plateforme NCHOOF quand il est différent,  il sera alors annoté d’un « * » :

coupable de l’infraction

non coupable de l’infraction

Que peut on tirer comme enseignements de ce classement? D’abord, que tous les principaux partis n’ont pas joué le jeu de la démocratie concernant l’affichage. Les règles étant nouvelles, les choses s’amélioreront avec l’expérience régulière d’élections nationales et locales. Les contrevenants aux infractions secondaires s’élimineront d’eux même avec le temps et la naissance d’une conscience politique dans l’esprit de chacun des Tunisiens.

Ensuite que de nombreuses irrégularités graves ont été constatées notamment avant la période de la campagne électorale. On ne peut raisonnablement pas parler d’aide alimentaire en période pré-électorale, c’est assimilé à un monnayage de voix ou à de la corruption. Bien que l’ISIE ne reconnaisse pas ces infractions puisque aucun observateur n’était encore en activité, les nombreux témoignages apportés par les citoyens pour dénoncer les dons d’argent, de bons échangeables ou de mouton doivent donner lieu à des enquêtes pour tirer au clair ces différentes allégations.

Enfin que très peu de partis ont conduit leur campagne pour eux et non contre les autres. Cette nuance place Afek Tounes et El Kotb en tête des partis ayant le plus grand fair-play éléctoral.

Voyant déjà poindre par avance les critiques d’un certain nombre de partisans  à la vue de ces résultats, nous les renvoyons au site de l’ISIE pour constater par eux-même de la véracité des données exposées dans notre tableau. Nous ajoutons que nous aurions également pu faire un autre tableau prenant en compte la gravité de l’infraction par un barème de points qui aurait par exemple permis au parti Ettakatol de figurer plus haut dans le classement. Car bien qu’il ait un quotient de fair-play électoral haut pour avoir utilisé des procédés interdits, ses infractions sont mineures. Notre tableau reflétant uniquement le panel possible des infractions et non pas la gravité et la multiplicité des infractions, le classement pourrait changer pour les partis figurant dans le ventre mou mais pas pour ceux en tête de classement qui resteraient en tête malgré l’apport de ces nuances.

Concernant les indépendants qui se plaindraient de ne pas figurer dans ce tableau, dans l’ensemble ils se sont majoritairement bien tenus en ne faisant eux aussi que des infractions à l’affichage, Doustourna par exemple figurerait également sur la première marche du podium.

Pour conclure, l’Observatoire politique tunisien souhaite de tout cœur, que l’ISIE prenne ses responsabilités, comme à Ben Arous où elle a invalidé deux listes qui présentaient un même candidat, en n’hésitant pas à exclure les listes prises en flagrant délit grave, de la course à l’élection. Il nous semble que toute tentative d’influence des votes devrait, de fait, exclure des résultats la liste en question parce que tout parti politique doit avoir le pouvoir de contrôler ses militants. Dans le cas contraire, il faut contraindre ses militants par l’application stricte de la règle, il n’y a que comme ça qu’ils comprendront et assimileront les règles de la démocratie.

A propos observatoirepolitiquetunisien

L'Observatoire Politique Tunisien est une initiative individuelle privée, non affiliée à un parti, qui a pour objectif de sensibiliser les Tunisiens à la politique. Par des présentations, des analyses et des commentaires de l'actualité politique du pays, nous tenterons de fournir aux lecteurs quelques clés pour analyser et comprendre la communication politique des différentes composantes du paysage politique tunisien.
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7 commentaires pour Tableau des incidents dans le processus électoral

  1. tunisien dit :

    Vous ne cessez de donner la mesure du caractère lucide, minutieux et pondéré de votre approche des différentes questions, de poser les bonnes questions et de mettre toute la mesure et la prudence qu’il faut à la formulation ou la simple esquisse de réponses, ce qui vous honore et fait plaisir.

  2. En attendant la conférence de presse finale de l’ISIE et nous l’espérons, la radiation de certaines listes pour infractions graves, il est à noter que l’ISIE a mis en ligne aujourd’hui sur son site l’annonce de tentative d’achats de voix par Afek Tounes à Kalaat el Andalous (rapport ISIE 1274) et de Ennahdha à Béja (rapport ISIE 1487).
    L’Observatoire politique tunisien mettra à jour le tableau une fois la conférence de presse donnée par l’ISIE.

  3. nationaliste dit :

    tout a été trafiqué,l’isie est nulle,je commence à douter de monsieur propre jendoubi s’il ne prend pas des sanctions contre NAHDA,c’est qu’il est avec eux ,pourquoi la majorité des chefs de centre sont nahdhaoui ou proche RCD.celui du CAIRE a un lien de parenté avec SAIDA AGREBI,les 2 observateurs qui sont avec lui c’est ses propres filles.ne me dites pas que jendoubi ne le sait pas.des urnes ouvertes sont arrivées avant le scrutin.Dans certaines urnes,on a trouvé plus de feuilles que de votants.des achats d’électeurs devant tout le monde et j’en passe.ou étes vous monsieur JENDOUBI dans tout ça;Rien,aucune sanction,monsieur n’est pas là , je trouve celà pire que du temps de Ben Ali,au moins avec lui ,on savait d’avance qu’il allait trafiquer.on s’est bien foutu de notre gueule,d’ailleurs j’ai le doigt bleu parceque je me suis mis le doigt dans l’oeil.

  4. najla dit :

    Je pense que l’ISIE a fait un grand travail que personne ne peut le nier ! que les chefs des centres sont de ennahda ou de RCD ceci n’est pas vraie car j’ai travaillé avec l’ISIE depuis Juillet et je connais plein de gens de l’ISIE qui n’appartiennent ni aux parti Nahda et ne sont pas des RCD. Les elections etaient transparente et seul le peuple qui a choisi et bien que je ne suis pas de Nahda ni avec leur projet et leurs principe je ne peux que accepter le résultat des élections et c’est ça la démocratie!

  5. BMI dit :

    De nombreux témoignages vidéo laissent l’arbitrage de l’ISIE à désirer. Il y a même le témoignage d’un membre de l’ISIE qui dénonce de nombreuses fraudes. Mais je reviens à l’application des lois et en l’occurrence celui du financement par l’étranger. Il serait intéressant de demander toutes les transactions financières des partis politiques douteux sur leurs financement à la société qui gère les transactions inter bancaire international : SWIFT. Seul le gouvernement provisoire est habilité à faire cette demande auprès de cette instance internationale. Les surprises seront à la taille des transactions !

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